Killing Joke - Tueurs à gag
Best
n°221 (décembre 1986)



Drolement fous plutôt que follement drôles, les Killing Joke échappent à tous les controles et font de plus en plus de victimes.

L'expression "killing joke" fait partie de ces termes anglo-saxons difficilement traduisibles mais qui décrivent bien leur objet. Prenons donc, si vous le voulez bien (n'avez pas le choix !), un exemple tout con. Et imaginons un pauvre type qui, crevant au beau milieu du Sahara, s'aperçoit qu'il a bêtement omis de prendre une roue de secours et que ses réserves de flotte sont aussi pleines qu'un frigidaire éthiopien. Eh bien pour lui, c'est la "killing joke", la blague bougrement désagréable, la vanne mortelle en somme, l'ironie implacable du sort.

Jaz Coleman, quant à lui, utilise une image encore plus forte pour expliquer la plaisanterie ultime. Pour lui en effet, la "killing joke" c'est un mec qui se retrouve durant une guerre dans une tranchée, on sonne la charge, il part à l'attaque à 10 contre 1000, et alors qu'il court vers une mort certaine et horriblement douloureuse, il pense au politicien qui a déclenché tout ce merdier et qui doit se la couler douce un verre de cognac à la pogne dans son douillet cottage du Sussex. Dur, dur, disait j'sais plus qui.

Drôle de vanne donc que cette "killing joke". Pas un hasard si ce frappé de Jaz Coleman se l'est accaparée pour qualifier les activités musicales de choc de son combo, car avec les Killing Joke, rien n'est raisonnable. Je connais peu de groupes qui soient parvenus à se forger une si mauvaise réputation en si peu de temps. La leur est épouvantable. Il faut signaler à cette occasion que la presse anglaise a fait là un travail de longue haleine assez ignoble pour tenter de leur casser la baraque. Dès le début ils ont été redoutés, puis détestés, dénigrés, calomniés pour n'être finalement acceptés du bout des lèvres que tout récemment. C'est que ces gens-là ne sont pas convenables. J'espère bien, non mais sans blague.

WAR DANCE

Pourtant, tout a commencé le plus gentiment du monde dans la paisible province britannique du Gloucestershire (capitale: Gloucester, bravo si vous aviez deviné), à Cheltenham plus exactement, cité ni vraiment champêtre, ni complètement surindustrialisée. C'est là que Jaz Coleman rencontre le batteur Paul Ferguson en juin 79 chez leur futur manager Brian Taylor. Jaz a une formation classique, il a en effet fait partie de cette institution à violons et trompettes anglaise nommée le National Youth Orchestra en tant que choriste (on recherche toujours des photos!), mais il s'en est vite remis en se prenant violemment le mouvement punk en pleine tête, et a dorénavant des prétentions de chanteur et de joueur de synthé.

Le discret Paul, qui a déjà écume les clubs et pubs de la région avec plusieurs groupes approximatifs, désire maintenant passer aux choses sérieuses. Mais nos deux hommes ont besoin de deux polisseurs de manche. Après plusieurs coups dans l'eau, ils tombent sur deux personnages à leur pointure, le guitariste Geordie et le fantasque bassiste Martin "Youth" Glover. Ces deux derniers n'ont d'ailleurs jamais joué dans un groupe auparavant, ce qu'ils se gardent bien d'annoncer à leur audition. Mais Jaz et Paul sont conquis, les deux nouveaux lascars font l'affaire. Une sale affaire. Le groupe répète alors dans le Gloucestershire et travaille directement sur des compositions personnelles. Ce qu'ils ont à exprimer ne peut en effet venir que d'eux-mêmes. Ils parviennent rapidement à décrocher des premières parties avec les Ruts, et excusez du peu, Joy Division. Leur set encore très brut et fouillis impressionne déjà les petits veinards qui assistent à ces tournées.

Fin 79, ils signent un deal avec le label Malicious Damage, une appellation qui leur va comme un gant, et sortent dans la foulée leur premier EP, Are You Receiving ?. Apparemment pas grand monde ne reçoit vraiment, mais le truc est plus que prometteur. Dès ce premier jet, on sent ces quatre sur-excités capables de grandes choses, leur acharnement à vouloir déverser leur énergie en faisant le plus de bruit possible les classe dès le départ en marge de la scène post-punk britannique, quelque chose de nouveau est en train de se déclencher, un nouveau mouvement, qui sait ?

Au début de l'année suivante, alors que la seconde vague du punk anglais recommence à y croire avec des groupes comme 1919 ou Chelsea, Killing Joke sort son Requiem. Dans ce single hypnotique, au tempo médium et lourd, on retrouve tous les ingrédients du style KJ, un mur du son de guitare, un Jaz hurlant sa hargne, et une rythmique musclée. Le groupe commence déjà à avoir un certain following fidèle qui se forme plus grâce au bouche-à-oreille qu'aux éloges de la presse spécialisée. Mais ce n'est vraiment qu'avec le 45t suivant, le classique WarDance, que les choses se précisent. Le single entre dans les charts indépendants, et le groupe n'en ressortira que pour investir en grande pompe les charts officiels cinq ans plus tard. WarDance, sur la pochette duquel on trouve Fred Astaire dansant sur un champ de bataille couvert de macchabées (une idée de ce pervers Mike Coles), devient rapidement un hymne de la belle jeunesse lobotomisée.

Mais laissons le toujours-en-verve Jaz exprimer lui-même sa conception de la danse de la guerre : La "War Dance", c'est la parano de tous, qu'on le veuille ou non. Nous sommes arrivés à un tel degré d'émotion que les gens doivent célébrer la danse de la guerre. C'est devenu une autre part de nous-même et cela n'a rien de pessimiste. Nous sommes simplement en train d'accepter la réalité, nous faisons face et c'est bien mieux que de baisser les bras ou de rêvasser. La musique de PIL ou de Joy Division par exemple ne mène les gens qu'à la déprime, cela mine tellement que, après l'avoir écoutée, tu n'as plus envie d'essayer quoique ce soit. Je préfère la rigidité, la tension, le conflit, cela me motive.
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PRIMITIVE

Nous y voilà. Une bonne part de cette sale réputation du groupe est à créditer aux déclarations ambiguës de Jaz. C'est à croire qu'il fait tout pour qu'on l'accuse des pires maux. Il dit par-là qu'il admire Wagner et Nietzsche, il annonce par-ci qu'une bonne grosse guerre serait une bonne chose, enfin bref tout pour qu 'on le taxe d'abominable fasciste. Et pourtant Killing Joke n'a rien d'un escadron fascisant. D'abord parce que pour cela il faudrait qu'ils acceptent les doctrines d'un système politique vicieux et qu'ils se plient à une discipline aveugle, ce dont ils sont incapables. Et ensuite parce que leur seul talent et prétention consistent à exprimer à leur façon l'absurdité du monde du 20° siècle et évoquer les violences urbaines au travers d'une musique justement extrêmement violente elle-même. Ils ne dénoncent en effet jamais clairement les injustices sociales, le chômage, la crise anglaise ou la guerre, ils sont déjà dedans jusqu'au cou, ils vivent cela depuis toujours, et ils connaissent déjà les pillages, les pénuries, les épidémies. Leur truc n'est jamais pensé, raisonné, planifié, ça sort du ventre, c'est primitif. Alors oublions ces conneries sur le fascisme (qui a aussi failli faire du tort à Joy Div' et même à Bowie) et revenons au premier LP, simplement intitulé Killing Joke qui sortit fin 1980 sur le label de Brian Eno, EG.

Et dès le premier album c'est le clash, la baffe, la grosse bertha. Le groupe y va droit à l'essentiel, ne s'encombre pas de détails dans le son et décharge son urgence à une vitesse difficilement supportable. L'intensité est telle que l'on pourrait le qualifier de hard-punk. D'ailleurs le seul instrumental du disque, Bloodsport, évoque plus que vaguement les premiers délires sonores de Led Zeppelin. Mais le principal atout de KJ réside dans des morceaux comme le bien nommé Primitive, WarDance (dont la version est ici encore plus sauvage que sur le 45) ou encore Complications. En plus, le packaging de la pochette colle parfaitement au contenu. On y trouve des gamins dévalant un mur apparemment au milieu d'une émeute. A l'intérieur on les retrouve face à un Christ plus diabolique qu'autre chose. Dans un coin de la photo apparaît pour la première fois leur petit personnage fétiche, une sorte de joker chauve au regard malsain et envoûtant. On est tout à fait dans l'univers Killing Joke.

L'année 81 va être bien remplie pour nos quatre garçons dans la tempête. Le groupe est aux states en tout début d'année et les pauvres ricains n'en croient ni leurs oreilles ni leurs yeux. Il faut dire que Killing Joke, sur scène, procure un effet unique. La personnalité de Jaz écrase complètement ses musiciens, on ne voit que lui; à cette époque, il est toujours vêtu d'une combinaison noire et se peint le visage avec de grandes trainées noires et rouges tel un guerrier africain. Son charisme qui tient du satanisme et de l'hypnotisme ne laisse personne indifférent. Mais les Etats-Unis ne sont pas prêts pour ce genre de célébrations païennes et le groupe rentre à Londres au printemps après avoir dévasté quelques chambres d'hôtel et avoir fait quelques déclarations scandaleuses. Ils y enregistrent le single Almost Red, suivi en mai du second grand classique du groupe Follow The Leaders / Tension pour lequel Nick Launay (qui travailla avec PIL) vient prêter main forte. Ces deux singles comme tous les disques précédents sont ; encore concoctés au départ dans leur propre studio 8 pistes pour être ensuite enregistrés au Virgin's Town House et produits par eux-mêmes.

Follow The Leaders, le morceau le plus hypnotique et le plus envoûtant de leur carrière restera 5 semaines dans les charts officiels mais ne dépassera pas la... 55" place. Pour les charts indépendants, c'est bien entendu une autre histoire. Bien que mieux enregistré que Killing Joke, What's This For... !, leur 2" album qui sort en octobre n'en est pas moins totalement la suite logique du premier LP. On y retrouve le même son de guitare en avant, les mêmes riffs cinglants, la même batterie qui a l'air d'avoir oublié ses cymbales et la même conviction enragée dans la voix de Jaz. Avec trois ans d'avance, Killing Joke inventait ce que l'on qualifierait plus tard de positive punk. Les points forts de ce disque sont avant tout The Fall of Because, son rythme syncopé et ses descentes de guitare très hardos, Tension, la face B de Follow the Leaders que l'on retrouve aussi ici. L'album entrera aussi par la petite porte dans les charts officiels et ce à la 42" place, ce qui est mieux que rien.

Mais le groupe provoque tout de même une belle controverse au sein de la presse britannique. La violence de leurs concerts et les allures de leurs fans les rendent aux yeux de certains.coupables de dégradation morale, de blasphèmes, de corruption (?), de magie noire et de tout un tas de sports de ce genre. Une association de Catholiques romains de Glasgow réussira même à faire interdire un de leurs concerts. KJ ne se traumatise pas pour autant, car le public est de plus en plus nombreux et inconditionnel. En 81, il n'est pas de ville en Angleterre où l'on ne trouve quelques Killing Joke bombés sur les murs.

HUM

C'est que dorénavant Killing Joke est entré, de force mais bien entré quand même, dans le panorama musical et social de l'Angleterre. C'est une sorte de mal nécessaire, une soupape de sécurité, comme la violence aux matches de foot, les beuveries aux pubs, ou les bookmakers. Mais alors que la musique rock anglaise adoucit le ton en 82 avec des revirements spectaculaires comme ceux, entre autres, d'Ultravox, des Stranglers ou encore de Cabaret Voltaire, les Killing Joke restent durs et fermes avec trois singles, Birds of a Feather, Empire Song et Chop-Chop, dont les deux derniers se retrouvent sur le LP Révélations. En fait de révélations, ce troisième album décocherait plutôt des flèches empoisonnées en direction de la société bien pensante anglaise. Les paroles sont au comble de la provocation. Dans Chop-Chop, Jaz déambule dans une banlieue résidentielle et la décrit comme un extra-terrestre allumé pourrait le faire. Dans We Have Joy il illustre la philosophie Killing Joke par ce refrain : "Nous étions saouls, intoxiqués, nous n'avions pas le temps de douter, pas de temps à perdre, j'ai vu le rieur, c'était l'Ouest, il m'a dit de prendre mon épée et de lacérer la chair, nous avons la joie".

Hum annonce l'arrivée d'un étrange vrombissement dans le ciel, parle de mouche mais il faut comprendre avions de chasse ou bombe. L'album, produit par Conny Plank (DAF, Neu, Ultravox...) fait un sacré bruit et ne fait que creuser davantage le ravin qui sépare leurs fans de leurs détracteurs. Mais le groupe semble avoir été trop loin, Jaz finit par vivre la folie qu'il déclenche à chacun de ses concerts et il commence à sérieusement dérailler. Et à la surprise générale, à la suite d'une tournée américaine et canadienne, il quitte l'Angleterre avec Geordie pour l'Islande, sans même prendre le soin de prévenir la maison de disques ou les autres musiciens.
Au début, Jaz et Geordie se joignent à un groupe local nommé Peyr, mais Geordie se lasse vite du bled et rentre à Londres retrouver le reste du groupe encore plus décalé que Jaz. Youth n'a alors parait-il plus toute sa raison suite à une trop grande et répétée absorption de substances diverses mais toutes illégales. Jaz restera 7 mois en Islande, se coupant complètement du monde rock et se recueillant dans la nature. Il y prépare un livre, une symphonie, et médite sur l'avenir du monde. A Londres tout le monde le croit fou à lier.

Quoiqu'il en soit, l'avenir de l'hypothétique groupe semble irrémédiablement compromis. On parle même à ce moment de pressions des médias pour le pousser à la rupture définitive. Durant cette période incertaine, il sortira quand même un disque, l'ironiquement intitulé Ha, un 25 cm live enregistré au Larry Hideaway de Toronto. Mais l'hiver devant être difficilement soutenable en Islande, Jaz se décide à regagner l'Angleterre fin 82. Sa première décision y sera d'éjecter Youth du groupe et de trouver Paul Raven pour le remplacer. Un nouveau Killing Joke est né et pour se faire la main, ils partent directement en tournée US.

Mais donnons la parole à Jaz pour nous raconter ses expériences islandaises:
J'y suis resté 7 mois, c'était très positif pour moi, je me sentais très créatif là-bas, en plus c'est un endroit idéal pour survivre (à la bombe ? ndlr). J'allais comme ça dans une grotte pour écrire une symphonie, c'était grandiose. Mais j'ai trouvé qu'il me manquait beaucoup de choses comme de boire et me saouler tous les soirs avec mes amis et faire la musique que j'aime.

A cette époque quand on demandait à Jaz ce qu'était devenu Youth il répondait invariablement : Je ne sais pas où il est et il ne le sait certainement pas lui-même. Youth a dû partir du groupe car il n'était plus en phase avec ce que nous sommes aujourd'hui. Il a fini par croire tous les commérages que l'on peut lire sur nous dans les journaux.
Donc, 83 sera synonyme de renouveau pour Killing Joke qui se remet à y croire. C'est dans le courant de cette année que sort le superbe Fire Dances, qui fut pourtant critiqué par les vieux fans. C'est que l'on y sent le groupe plus mûr, plus sûr de lui, avec un son beaucoup plus clair qu'auparavant. Pourtant l'énergie brute et primaire est toujours bien présente dans des titres comme The Gathering, Dominator ou Song and Dance. Fire Dances est aussi l'occasion pour le groupe de montrer ses trombines sur une pochette (intérieure il est vrai) de dique. Symbole d'une certaine ouverture ? Peut-être mais le groupe est toujours survolté sur scène, et durant cette année 83 ils vont pietinner les planches. Toute l'europe sera conquise par leur rock démoniaque, y compris des pays peinards et neutres comme la Suisse et la Suède qui d'habitude préfèrent une pop plutôt mielleuse. Dorénavant le groupe a ses émules qui ont pour noms Sex Gang Children, Southern Death Cult (futur The Cult), Ritual etc. toute une nouvelle génération de rockers anglais élevés au biberon punk et s'étant fait leurs premières dents sur Joy Division, Spear of Destiny, PIL et Killing Joke. Mais ces derniers ne les voient pas arriver d'un bon œil :
Ils nous imitent un point c'est tout. On les connaît bien, tu parles, ils nous suivaient partout en tournée, ils dormaient dans notre camion, dans nos chambres d'hôtel, ce sont juste d'anciens fans, déclarera Jaz à votre serviteur. Pourtant, KJ pourrait être fier d'être à l'origine de tout un mouvement qui nous a donné The Cult, Flesh For Lulu, les Sisters of Mercy ou encore plus près de nous Oberkampf.

EIGHTIES

En 84, ils passent quelques mois à Berlin avec le producteur Chris Kimsey, qui aussi bizarre que cela puisse paraître bossa avec les Stones ( Emotional Rescue, Tattoo You, Under Cover), Peter Frampton et même Peter Tosh ! Cette surprenante association se concrétisera début 85 par le 5eme LP du groupe, Night Time. Le virage amorcé avec Fire Dances est alors bien confirmé. Le rock hargneux s'est légèrement assagi et Killing Joke obtient même un hit, Love Like Blood à la surprise générale. Les puristes font la gueule, mais la maison de disques se frotte les mains. Killing Joke s'ouvre une nouvelle carrière avec un public tout neuf et très jeune, pratiquement le même que Cure ou même Depeche Mode. Mais Jaz se balance de savoir de quoi est composée sa clientèle: On s'en fout de toutes ces conneries, on n'a jamais fonctionné grâce aux modes, Killing Joke n'a jamais été rien d'autre que Killing Joke et c'est très bien que de nouveaux publics nous découvrent aujourd'hui, on n'a jamais voulu avoir de vieux fans gâteux.

Mais la machine est en route et beaucoup de vieux fans gâteux se détournent d'eux car ce n'est pas un hasard si Love Like Blood investit le Top 20. Le morceau est bon, mais n'a rien à voir avec les délires sonores, la hargne vitale des disques précédents. Autre morceau phare de Night Time, Eighties, célèbre énergiquement la passion de Jaz pour cette décennie.
Je suis très excité par les 80's, c'est une des plus fascinantes périodes de l'histoire car il va y avoir de profonds changements. Je crois en un monde futur, je ne suis pas nihiliste. Des choses folles vont se produire, de grandes mutations vont voir le jour. Ainsi la nature va devenir la super-nature, seulement 20 % de la population mondiale va survivre car personne n'est prêt, puis il y aura de nouveau un monde sauvage. Les images de ce monde sont celles que tu vois quand tu écoutes KJ.

Et il est vrai que plus que jamais les textes de Night Time
évoquent un univers à la Conan le Barbare meets Blade Runner, frisant une imagerie des plus heavy métal. Depuis, les Killing Joke sont rerentrés en studio avec Chris Kimsey pour leur 6eme album, Brighter Than a Thousand Suns. Ayant déjà la pré-cassette de l'œuvre tant attendue (sa sortie est repoussée depuis 4 mois) je dois avouer qu'il ne mérite pas, et de loin, tous les espoirs que beaucoup avaient mis sur lui. Le son est encore plus sage que sur Night Time, et le KJ rock est devenu une sorte de compromis entre Human League et le style originel. Vous connaissez déjà probablement leur nouveau hit, Adorations, le single traînant et mou, le reste n'est guère mieux, mis à part Rubicon, le plus nerveux du lot.
Pourtant à écouter Jaz, cet album est leur meilleur: Notre musique s'est développée, ce disque est notre chef d'oeuvre, c'est LA création, c'est de la puissance honnête, c'est colossal. L'explosion vient plus lentement mais elle est atomique dans le sens naturel du terme. Ce que nous faisons maintenant est tout ce que j'avais rêvé de Killing Joke, il n'y a plus de claviers et nous sommes devenus comme un véritable orchestre car on a chacun notre partie à jouer qui se mêle et forme un véritable tout, c'est fantastique.

Et quand je lui ai demandé ce qui avait changé dans leur façon de travailler depuis qu'ils étaient devenus un groupe à hit singles, Jaz m'a répondu : Rien, on est toujours les mêmes, il y a toujours les mêmes conflits entre nous, on a pu rembourser pas mal de dettes, c'est tout. Et ne crois pas que les maisons de disques et toute cette merde exercent plus de pressions sur nous, c'est tout le contraire, on passe notre temps à les persécuter.
Je l'espère bien, ils ont une réputation à maintenir tout de même. En attendant de les revoir sur scène et en grandes pompes au Zenith cette fois, je leur souhaite de ne pas jouer à devenir aussi gros que le bœuf Cure, je les préfère tant en crapaud maléfique.

Georges DAUBLON

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